La Diatiguiya est le symbole de la cordialité et de l’hospitalité malienne, rendant les échanges très conviviaux. Elle est une tradition séculaire, car le visiteur étant sacré, lui offrir l’hospitalité est un devoir. Tout visiteur est séduit et marqué par cette coutume. Depuis les temps immémoriaux, nos ancêtres ont toujours accueilli les étrangers, et cela sans arrières pensées. La diatiguiya permettra de donner un séjour agréable aux étrangers. C’est pourquoi, l’étranger bénéficiera d’un bon traitement de la part de ses hôtes. Tout est fait à l’honneur de celui-ci.
Nomade, le peul à chaque village d’accueil a un diatigui. Le diatigui peut être un autochtone du village ou un autre éleveur qui est dans le village depuis des années, qui s’est fondu dans la population et que la population ne considère plus comme étrangers. Parce que ça fait longtemps qu’il vit parmi les autochtones, il est le responsable du peul. En cas de problèmes le peul passe forcément par lui. Exemple : son installation, octroi des terres, c’est le diatigui qui est l’intermédiaire entre le peul et les propriétaires terriens. Mais de nos jours ces choses commencent à se dégrader.
Dans le cadre du programme de recherche sur les nouvelles mobilisations politiques parmi les populations peules au sahel, notre équipe de recherche s’est rendu du mercredi 21 février au vendredi 23 février 2018 à Bougouni, une ville située à 162 km de Bamako, pour sa première mission dans la zone.
Nous nous sommes rendu compte que dans cette zone, la situation des bergers peuls devient de plus en plus précaire, d’où notre l’interrogation sur l’avenir de la diatiguiya ?
Les peuls sont devenus des sources de problèmes et le diatigui est le premier à payer cher aussi.
C’est l’exemple du jeune Moussa qui nous a fait part de son histoire au marché de bétail de Bougouni. Moussa vient de Yanfolila, commune de Yorobougoula, village de Madina Diassa. Commerçant de bétail et l’éleveur à la fois, Moussa est devenu le diatiguiya de pas mal de peuls dans la zone. Dans son village, ces frères villageois lui ont ordonné de quitter le village.
Pour lui, son histoire n’a pas de fondement. Elle est liée au problème des animaux. Il pense que sa population n’aime pas seulement les animaux. Sinon que les animaux n’ont pas fait de dommages à qui se soit. La population a pris un de ces bergers, ils ont attaché ce dernier et voulait le tuer même. « C’est là que j’ai eu ma part du gâteau avec les habitants. »
Photos par Mirjam de Bruijn
Etant conseiller communal, le maire dit qu’il ne peut pas interdire aux animaux de quitter la brousse. Il ne peut pas non plus demander à la population d’aller chasser les gens de la brousse. Les propos du maire n’a pas fait effet car nos maires aussi ne sont pas considères. Les gens n’ont même pas écoutés ces propos, ils ont continué.
« Moi, je n’ai même pas mis ma bouche dans l’histoire. Le berger qu’ils ont pris et attaché, c’est le patron de ce dernier qui a porté plainte, car son berger a fait plus de 24h sans que personne n’ait de ces nouvelles. C’est le juge qui a ordonné aux gendarmes d’aller remettre les convocations aux gens. C’est en ce moment, que j’ai eu ma part dans l’histoire. »
« Ils sont venus, tout saccager chez moi. Ils ont tout détruit. Ils voulaient me tuer même, heureusement que j’étais en déplacement (…)
Nos autorités ont pris quelques-uns. Ceux qui étaient convoqué, ont été finalement libéré par le juge, parce que dans la zone le juge réagit selon la corruption donc l’affaire n’a pas eu de suite (…)
Une fois en liberté, ces gens se sont tournés contre moi encore, ils ont déposé une plainte auprès du juge me demandant de quitter le village, alors que mon père est là-bas depuis 50 ans, moi-même je suis dans ce village. Le juge a pris parti pour le village et m’a convoqué à plusieurs reprises, en me demandant de quitter. Comme je n’ai pas voulu, le juge a finalement pris une décision de justice, dans cette décision il y avait une crosse qui l’exigeait à ce qu’on détruise le lieu où je fais mon embauche.
Finalement, j’ai fait appel et le juge n’a même pas voulu me rendre aussi facile la procédure. Donc j’étais obligé d’aller à la cour d’appel pour faire appel directement. J’ai remis le papier d’appel au juge local. Le dossier est en appel. Le jugement était prévu pour le 31 janvier et 02 février le 2018.
Ils ont détruit mon parc d’embouche. Avec les instances supérieur de la justice, ils ont pu aller faire le constat que mon parc a été détruite alors que ça n’aurait pas dû puisque l’appel est suspendu. Le dossier est entre les mains de la justice supérieure. Tout ça parce que je suis le diatigui des peuls, chose qui a été mon seul tort. Mais ils pensent que si le patron du berger est allé jusqu’à porte plainte que c’est sous mon incitation (…)
Les peuls dont, j’étais le diatigui sont partis. Ils ont quitté la zone, vu que le juge même a déjà pris de l’argent avec la population, donc ils ont eu peur de subir d’autres abus.
La décision qui s’applique dans mon village pour le moment est l’interdiction de tous les animaux de peul en brousse. Quand, on te trouve soit on te frappe, soit on te chasse.
Ma propre famille est interdite de bénéficier de certain nombre de services tel que l’eau à la pompe du village, des achats à la boutique alors que ma famille est composée de 20 à 40 personnes (…)
C’est de ça que je vis. »
Contrairement à ceux de Yanfolila, les peuls de Sido, n’ont aucun problèmes avec leur diatigui. Leur gestion de conflit se fait de façon traditionnelle comme toujours. Ils vivent en harmonie avec la population autochtone.