De tous les temps, les Peuls et Dogons ont vécu ensemble avec les hauts et des bas en terme de tension. Mais jamais les tensions n’avaient atteint ce seuil dont nous vivons depuis notre époque moderne.
Historiquement parlant les Dogons seraient venu de Mandé à la recherche zone sûre pour leur sécurité, ils se seraient installé à Kanibozon et le long des falaises. L’espace dit aujourd’hui du pays dogon (appellation qui est aujourd’hui contestée par les Peuls) se compose de falaise de Bandiagara et de la plaine (Séeno). Les Bwa étaient les premiers habitants du Séeno. Entre les Peuls et Dogons, plusieurs hypothèses s’affrontent pour situer le premier occupant du Seéeno. D’une part d’aucun dirait que les Peuls ont chassé les Bwa pour avoir le Séeno et tenter de contrôler les Dogons, selon cette hypothèse, les Dogons étaient sur les falaises et venaient cultiver dans la plaine et ont même souvent emporté la terre sur les plaines pour cultiver ; les Peuls étant transhumant ne contrôlent plus la plaine. D’autre part les Dogons se réclament de précurseurs non seulement sur la falaise était par peur des razzias esclavagistes dans laquelle les Peuls seraient actives, vu aussi aujourd’hui les Dogons sont la communauté dominante de la zone.
A la crise et conflit qui met en confrontation ces deux communautés, certains attribuent le fond de problèmes dans cette histoire qui est maintenant devenu un problème foncier.
Avec la démographie et le caractère sédentaire des Dogons, les Dogons de la falaise ont envahi la plaine depuis le flanc des falaises jusqu’au Burkina dans le Sourou depuis la règne d’Al HADJI Oumar est ses successeurs fins XIXème siècle. Cette colonisation a continué durant l’époque coloniale et l’indépendance [1].
Avec les changements climatiques, assortie des grandes sècheresses des années 1980, les rendements de cultures devenaient faibles et les Dogons avaient besoin de terre. Entre temps à l’Indépendance, les Dogons ont été à l’école, ils sont devenus officiers, des grands intellectuels, et grands commerçants donc ils sont mieux placés maintenant pour défendre leurs intérêts.
Pour démontrer le problème foncier, on peut évoquer le conflit à Sari dans le cercle de Koro. Ce village Sari était un gros village Peul où il y a une grande mare qui ne tarie pas et tout autour de cette marre, il y a des très riches terres. Sur le plan foncier, il y avait dix villages qui étaient alentours de Sari. Un litige foncier dans ce village a conduit aux massacres des pasteurs peuls par les agriculteurs en septembre 2012. Depuis 1999, le climat délétère s’était installé entre les deux communautés. Déjà en 2002 un conflit sur l’accès de la marre avait manqué de se déclencher entre ces deux communautés. Les juridictions de Koro avaient tranché l’affaire en faveur des éleveurs. Les dogons ont réclamé la marre et sont passée par la justice de Koro, ils n’ont pas eu gain de cause, Mopti, Bamako aussi, ils n’ont pas eu encore gain de cause. C’est en septembre 2012, quand les autorités ont fui, quand des rebelles MNLA ont pris le pouvoir au nord du Mali, qu’ils ont profité d’incident déclenche entre un Peul et un Dogon pour aller attaquer le village Sari avec plusieurs dizaines de morts et des milliers de déplacés au Burkina [2].
A. Bourgeot dans Horizon nomade en Afrique sahélienne, P310 nous montre que le village Sari relevé coutumièrement de la chefferie peule de Banh au Burkina, tandis qu’administrativement il relevé de Dinanguru au Mali.
Certes, il y a eu des missions de bon office pour essayer de concilier les belligérants avec quelques arrestations des présumés auteurs, mais ce sont ces épisodes de violence qui jouent en partie un rôle direct dans la dynamique d’armement des groupes nomades peuls dont une partie est allé rejoindre la même année le mouvement radical de MUJAO. Depuis lors ; les affrontements ne cessent de se répéter. Entre temps la milice auto défense Dana Ambassagou a vu le jour qui comme tous les autres groupes armés d’ailleurs sont pointés du doigt pour des prétendus présumés bavures même s’elle porte des démentis à l’encontre des accusations qui lui sont faites. Cette milice contrairement à ce que beaucoup avancent n’est pas constitué que des Dogons seulement, elle regorge même les Peuls rimaybés [3].
Aujourd’hui, la situation a atteint le seuil d’atrocité qu’on est en mal de réfuter des l’hypothèse de conflit intercommunautaire. On rappelle ici qu’il n’a jusque-là pas d’unanimité sur la qualification de ce conflit qui ronge le terroir dit de ‘pays dogon’. Beaucoup de personnes trouvent qu’il y a une sorte d’activation des tensions entre les communautés par les terroristes comme mode opératoire.
Il y a beaucoup des accusations d’un côté à l’autre d’avoir commence mais le plus important est que ça finisse.
Pour mettre fin à ces tensions, Mathieu Pellerin avance qu’il faudrait mettre en place à court terme des ‘cadres de concertation permanents’ pour “désamorcer au plus tôt une crise de cette nature, toujours fondée sur des logiques de représailles dictées sur l’amalgame entre identité communautaire et appartenance à un groupe djihadiste” et que l’Etat doit absolument décourager toute forme de millicianisation et éviter les dynamiques d’armement des communautés voir le cas de Dana Amassagou parce qu’en retour, cela pousse objectivement les Peuls à rejoindre des groupes djihadistes pour y chercher protection.
A court terme, l’Etat doit associer les leaders religieux, les chefs coutumiers et les responsables des milices au niveau local aux différents initiatives de recherche de la paix. A plus long terme, la cohabitation des communautés passe par une révision du code foncier qui prendra en compte le pastoralisme et son application à la lettre.
Au niveau de la société civile, les différentes associations (peuls et dogons) doivent surpasser leurs conférences de presse à Bamako dans lesquelles on ne cesse d’entendre les accusations de tel ou tel groupe, en même le temps elles tirent les ficelles communautaires sur le terrain et attisent le feu. Elles doivent véhiculer les messages de paix sur les médias en toute franchise tout en faisant attentions aux politiques de ne pas les mettre devant, sinon ils penseront toujours à leur électorale, éviteront des débats honnête et franc entre les communautés.
A mes frères peuls ne te rend pas vers la violence et n’oublie jamais les trois choses de la vie d’un peul: semteene, hakkilo et munyal.
[1] Jean Gallais, 1975, Pasteurs et Paysans du Gourma
[2] Entretien avec M.CISSE, un responsable de Tabital Pulaaku
[3]Riimaybe sont les esclaves affranchis de l’Elite peul